Jean Guidoni @ Vingtième Théâtre
Guidoni est un vieux monsieur un peu bedonnant et très grisonnant, qui a connu son heure de gloire, ou plutôt son quart d'heure, dans les années 80 grâce à un répertoire réaliste et à une approche très théâtrale de la scène qui évoquent Higelin. Il sautille tant bien que mal et dansouille à travers la scène, revisitant pour l'occasion l'ensemble de son répertoire, accompagné en tout et pour tout d'un seul piano. Ce genre de personnage devrait en toute logique engendrer l'agacement (trop de cabotinage) ou une aimable pitié, avec son couplet rituel sur le vieil artiste qui s'accroche à la rampe pour financer les fins de mois qui commencent le 2, etc...
Mais ce qui est fort, et toujours bluffant, chez Guidoni, c'est sa façon de s'élever toujours au-dessus de tout ça : en partie parce qu'il est homme de scène avant tout et qu'il a en général un public conquis, il est capable, en quelques chansons, d'atteindre des moments de grâce que peu d'artistes peuvent espérer. Dans ces moments, les limitations de sa voix disparaissent, et il est difficile de rester critique face à l'univers qu'il décrit de paumés du petit matin ; il trouve le ton juste et une bonne dose d'auto-dérision permet de faire passer un authentique tragique. En particulier ses "grands titres" ("Il y a" ou "Djemila") résonnent longtemps - un petit regret, l'absence de deux titres particulièrement réussis de son avant-dernier album, Cloaca Maxima et Oh Loup.